Sainte-Suzanne : troisième journée de la fête de la Vanille ce samedi

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Elle démarre ce jeudi 8 août et s’achèvera ce dimanche. C’est Bernard Batou, du cabinet du maire, qui s’est chargé de l’introduction. Puis, entouré de René Sotaca, conseiller départemental représentant du président Cyrille Melchior et d’autres élus et personnalités du monde culturel, Maurice Gironcel, maire de Sainte-Suzanne et président de la Cinor, a présenté ce lundi 5 août, lors d’une conférence de presse, les grandes lignes de la 11ème édition de la fête de la vanille qui se déroulera dans la commune de Sainte-Suzanne, au Bocage Lucet Langenier, du jeudi 8 au dimanche 11 août.

Une fête qui connaît, chaque année, un énorme succès auprès du public. Lequel n’hésite pas à venir nombreux assister et/ou participer aux différentes animations proposées par le comité organisateur qui met les petits plats dans les grands. Un public qui se déplace avant tout pour le programme artistique. Un podium qui, comme vous pouvez le constater, sera riche et pourra satisfaire tous les goûts.

Il y a le volet artistique, mais la municipalité de Sainte-Suzanne insiste également beaucoup sur le volet historique et culturel de cette fête de la vanille organisé avec le soutien du Département, de la Région, de la Chambre d’agriculture, de l’Association développement culturel et sportif de Sainte-Suzanne, de la Vanilleraie, de Pro Vanille, de l’Association pour la promotion de la vanille à la Réunion (A2VR), du Crédit Agricole, du Codem et de l’Indication géographique protégée (IGP).

« À travers cet événement, la municipalité de Sainte-Suzanne souhaite accomplir son devoir de mémoire en rendant hommage à Edmond Albius pour sa découverte du procédé de fécondation artificielle de la vanille. Il est impossible de retracer l’Histoire de La Réunion sans évoquer celle de son industrie agricole. La société et l’économie réunionnaise se sont bâties autour de l’économie de plantation instaurée durant l’époque coloniale », a précisé Maurice Gironcel en parlant de « l’or noir » de la Réunion, « qui occupe également une place significative dans l’histoire agricole de La Réunion, bien que souvent méconnue et peu valorisée. Pourtant l’île de la Réunion a joué un rôle majeur dans l’exploitation de cette variété d’orchidée.

En 1819, Pierre Bernard MILIUS, alors gouverneur de l’île, a introduit de nouvelles espèces végétales en organisant des expéditions à travers le monde. C’est ainsi que le commandant PHILIBERT a rapporté les premières boutures de vanille de Guyane. L’année suivante, le commandant PHILIBERT de retour d’une nouvelle expédition, présente au gouverneur d’autres boutures de vanille provenant de Manille. Malheureusement, ces variétés ne s’adaptèrent pas au climat de la Réunion et elles dépérirent.

En septembre 1822, Monsieur MARCHAND, ordonnateur de Bourbon, a ramené du Muséum de Paris des boutures de vanille mexicaine, la « vanilla fragrans », qui s’est bien adaptée à l’île. Toutefois, malgré les efforts des jardiniers et botanistes locaux et européens, les plants de vanille restaient stériles en raison de l’absence de l’abeille pollinisatrice naturelle présente au Mexique ».

La découverte du petit génie Edmond Albius

À Sainte-Suzanne, Ferréol BEAUMONT BELLIER, passionné de botanique et d’orchidées, réside sur les hauteurs de la commune où il poursuit ses recherches sur la vanille. Pour la fécondation de ses fleurs, il est assisté par le jeune Edmond, orphelin depuis sa naissance, qu’il a pris sous son aile.

Par exemple, il lui apprend à féconder une plante de la famille des citrouilles, appelée Jolifiat, dans laquelle fleurs mâles et fleurs femelles sont placées sur des rameaux différents. Il montre à l’enfant comment cueillir les fleurs mâles pour les poser sur les fleurs femelles. En 1841, lors de la floraison du vanillier, Ferréol Beaumont Bellier se promène dans son jardin avec Edmond et remarque une belle gousse sur son vanillier. Edmond explique alors qu’il a lui- même fécondé la fleur. Le maître, sceptique, refuse de le croire. Cependant, quelques jours plus tard, une seconde gousse apparaît près de la première.

Pour prouver ses dires, Edmond réalise devant lui la délicate opération de pollinisation manuelle, mettant en contact les organes mâles et femelles de la plante, une méthode aujourd’hui largement répandue. La démonstration d’Edmond suscite un grand intérêt chez les planteurs locaux, désireux d’apprendre ce procédé. Malgré cela, de nombreux botanistes de l’époque refusent de reconnaître qu’un jeune esclave puisse être à l’origine d’une telle découverte.

Le 20 décembre 1848, l’esclavage est aboli à La Réunion. Edmond, désormais homme libre, prend le nom d’Albius, signifiant « blanc ». Son ancien maître Ferréol BEAUMONT BELLIER et ses amis tentent en vain à maintes reprises d’obtenir de la colonie une « rémunération publique » pour Albius, sans succès. Edmond Albius décède le 9 août 1880 à Sainte-Suzanne, dans le quartier de Village- Desprez. Quoi qu’il en soit, le geste d’Albius, qu’il ait été volontaire ou non, s’est perpétué dans toutes les plantations de vanille à travers le monde, contribuant ainsi fortement à la renommée de l’île de La Réunion. Grâce à cet héritage, Sainte-Suzanne est reconnue comme la ville pionnière dans le procédé de fécondation artificielle de la vanille. La liane de vanille ornant le blason de la ville ainsi que la citation en latin : “Hic Vanillam Albius fecundavit” ; Ici Albius féconda la vanille » témoignent de cette contribution historique.

Le prix “Marianne d’or” décerné en décembre 2023

En 2023, Sainte-Suzanne a été honorée par le prix Marianne d’Or dans la catégorie ‘’Modernité et Mémoire’’ pour son projet en hommage à Edmond Albius. La cérémonie de remise de cette distinction s’est tenue le 12 décembre à Paris, présidée par Monsieur Alain Trampoglieri, secrétaire général du concours.

“ Cette récompense marque un tournant décisif pour notre initiative visant à faire reconnaître la découverte d’Edmond Albius par l’UNESCO. Attribuée à un moment particulièrement significatif, à quelques jours de la commémoration de l’abolition de l’esclavage le 20 décembre, cette distinction met en lumière l’importance de continuer à aborder les enjeux historiques de notre passé”, a fièrement annoncé le maire Maurice GIRONCEL, en décembre dernier. “ Le prix Marianne d’Or a ouvert de nouvelles perspectives pour l’avenir de notre ville. Il a encouragé la

révision de notre politique touristique et culturelle intercommunale, en soulignant la nécessité de valoriser notre patrimoine” confirmait Bernard Batou, de l’Association Sauvegarde de la Mémoire Réunionnaise, qui milite pour que cette reconnaissance soit portée au plus haut.

Le patrimoine culturel joue un rôle crucial dans la compréhension de notre passé et la transmission de notre héritage aux générations futures. Edmond Albius, reconnu pour ses contributions scientifiques majeures, nous inspire à continuer à écrire l’histoire et à enrichir notre culture en nous appuyant sur ce précieux héritage.

L’odysée de la vanille : des origines aux terres créoles

Parmi les moments forts de la fête de la vanille, l’exposition « Voyage de la vanille vers les terres créoles » promet d’offrir une immersion captivante dans l’histoire et la culture de la vanille. Cette exposition permanente, qui se tient au jardin du patrimoine et de mémoire de Sainte-Suzanne, retrace le parcours fascinant de la vanille, depuis ses origines lointaines jusqu’à son implantation et son développement dans les terres créoles.

Présentation de l’exposition élaborée sous la direction scientifique de l’historien Mario Serviable, de l’association ARS Terres Créoles. « Quand la vanille est introduite à Bourbon, future La Réunion, au début du XIXe siècle, elle vient de l’autre bout du monde, chargée d’une histoire impériale de domination. Mais c’est son implantation dans l’île qui va déterminer son véritable destin. Les Réunionnais vont métamorphoser cette orchidée pour en faire une production quintessenciée d’arômes surprenants et lancer à la conquête du monde l’épice-artefact la plus goûteuse connue. La vanille Bourbon, considérée comme la meilleure au monde, est une aventure réunionnaise en trois étapes avec trois acteurs majeurs ; la première concerne l’acclimatation de l’orchidée vanillier, la seconde la fécondation humaine de la fleur et la troisième, la transformation du fruit insipide en gousse odoriférante. Trois Réunionnais sont responsables de ce sortilège agronomique : Henry-Pierre Philibert, héros de Trafalgar, qui a introduit « la liane sarmenteuse » de la Guyane, Edmond, l’enfant botaniste, esclave à Sainte-Suzanne et qui remplaça l’abeille maya aux yeux bleus comme pollinisateur de la fleur, et le pharmacien Ernest Loupy, transformateur-alchimiste avisé pour la maturation en malle fermée. L’exposition est un hommage à Philibert, marin émérite, personnage majeur et méconnu de l’Histoire de France et député de l’île, – un personnage sorti tout droit d’un roman d’Alexandre Dumas – pour le bicentenaire de sa disparition, le 31 octobre 1824, à l’âge de 51 ans.

Maurice Gironcel a rappelé que « cet événement vise à renforcer les liens sociaux en transcendant les clivages et en favorisant des valeurs d’échange, de solidarité et de partage. Il met également en avant la transmission de savoir et de savoir-faire à travers diverses activités, telles que la journée dédiée à la jeunesse, l’exposition de voitures anciennes, les concours, et bien d’autres animations … »

La municipalité invite les acteurs locaux, artisans et producteurs, à exposer le fruit de leur travail dans une animation intitulée « Village Vanille ». Cette année, l’accent sera mis sur les petits producteurs de vanille, héritiers d’un savoir-faire transmis de génération en génération. Le public pourra découvrir les différentes espèces de vanille cultivées sur l’île ainsi que des produits confectionnés à partir de la vanille, de son arôme ou essence.

La municipalité de Sainte-Suzanne et les organisateurs de cette 11ème édition de la fête de la vanille invitent les Réunionnaises et les Réunionnaises à venir nombreux « pour célébrer ensemble la richesse et la diversité de la vanille de Sainte-Suzanne, et rendre hommage à Edmond Albius pour son immense contribution ».

Yves Mont-Rouge

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Téléphone : 0692 85 39 64

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