« Libérer la terre réunionnaise »

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Ne jamais désespérer car Paris ne s’est pas fait en un seul jour. Tout est une question de prise de conscience. Les quelques lignes que j’ai couchées noir sur blanc dans mon « Ti Kozman » du 28 octobre dernier à propos du recrutement d’une jeune parisienne sur un contrat de 6 mois, à la préfecture de la Réunion, au détriment des quatre jeunes Réunionnais diplômés qui avaient postulé au service juridique, font leur chemin. J’avais également évoqué une filière « métronésienne » toujours à la préfecture de la Réunion, c’est-à-dire des fonctionnaires responsables de service qui font venir leurs petits camarades avec qui ils avaient bossé auparavant au Haut commissariat de la République en Polynésie française alors que des fonctionnaires réunionnais basés en métropole attendent vainement une mutation dans leur île natale depuis des lustres. Ça fait beaucoup jaser en interne. Evidemment, les personnes concernées me traitent de « raciste » voire « d’indépendantiste », mais toutes les autres applaudissent des deux mains et se félicitent que ces « copinages » aient pu enfin être mis sur la place publique. Même les syndicats se sont emparés de ce dossier, à l’instar de la CGTR intérieur qui s’est fendu d’un mail, le lundi 31 octobre dernier, soit 3 jours seulement après le « Ti Kozman », au préfet Jérôme Filippini. Voici le contenu du mail qui est on ne peut plus clair :

« Bonjour Monsieur le Préfet,
nous vous invitons à prendre connaissance si tant est que vous ne l’ ayez déjà fait, de ce qui a été publié sur (lien vers l’article). À la lecture de cet article de presse, il existerait une « filière métronésienne » à la préfecture de la Réunion. Comprenez par là des camarades métropolitains qui figuraient dans l’organigramme du haut commissariat de la République en Polynésie française, et qui se retrouvent tous à la préfecture de la Réunion. »
C’est déjà la deuxième fois cette année que la préfecture et ses services font l’objet d’une attention dans la presse (article zinfo974 sur la fraude à la continuité). Au regard de ce qui avait été révélé, la CGTR intérieur avait demandé en comité technique sur quels critères et par quelle méthode vos services effectuent les divers recrutements (contractuels,  mutations) au sein de la préfecture et du secrétariat général commun. 
À ce jour ni le semblant de réponse apportée ni la nouvelle actualité ne permettent de dire que les règles sont parfaitement claires et connues de tous.  Selon le principe défendu par la CGTR « à compétences égales, pour des recrutements locaux »  nous vous demandons de :
1. Nous expliquer comment sont effectués les recrutements au sein de vos services
2. Mettre un terme a des pratiques qui vont manifestement à l’encontre des règles d’égal acces aux emplois publics et qui pourraient s’apparenter à des passes droits ( par exemple des affectations prioritaires pour des conjoints et conjointes de sous-préfets alors que des fonctionnaires et leur famille doivent attendre des années leur mutation)
3. Permettre des recrutements locaux et des affectations locales compte-tenu de la problématique particulièrement tendue de l’emploi à la Réunion,  ainsi que des difficultés rencontrees par les reunionnais tout au long de leur carrière dans la fonction pu d’état (mutations, éloignement, retour au péi, à nouveau mutation,  éloignement) autant d’obstacles qu’ils doivent surmonter qui sont facteurs de rupture d’égalité de traitement. 
Cordialement ». D’après mes informations, le préfet n’aurait pas encore répondu au syndicat. Mais il n’empêche que ça fait causer au sein du service et au sein de la préfecture. C’est déjà ça ! Comme dirait l’autre, « ti pas, ti pas, va arrivé… ».

« Stopper l’accaparement de la terre réunionnaise par l’Administration »

C’est ce qu’espèrent également de nombreux élus et de nombreux citoyens concernant les décisions parfois (pour ne pas dire souvent) incohérentes de l’administration via des commissions comme la CDPNAF ou la CDNPS. Je vous en parlais également dans le « Ti Kozman » de la semaine dernière de ce sujet qui a suscité une multitude de réactions de la part de la classe politique et des citoyens, si je devais en juger par le nombre de fils ou de commentaires (en message privé) que j’ai reçus, du genre : « il faut mettre cette injustice sur la place publique ». Les témoignages allant dans ce sens ne manquent pas; Ils  arrivent des quatre coins de l’île. « J’ai un terrain agricole à la Plaine-des-Palmistes où je cultive le goyavier, j’ai demandé l’autorisation de bâtir un hangar de 40 mètres carrés afin de stoker mes produits. Refus catégorique de la CDPNAF », m’écrit cet agriculteur de l’Est. Idem pour un autre de Saint-Paul, ou pour un éleveur de cabris du côté de Salazie et, ainsi de suite.

Et quand l’agriculteur passe outre l’avis de l’administration et construit, malgré tout, son local sur son terrain agricole parce qu’il en a besoin pour travailler, l’Etat lui envoie un tractopelle pour une opération de démolition. Personne n’y peut rien, pas même le maire de la commune concernée qui n’a nullement la maîtrise de son territoire. Ce sont la CDPNAF (Commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers) ou la CDNPS (Commission départementale de la nature, des paysages et des sites) qui décident en la matière. Des commissions au sein desquelles siègent certes des élus mais ils ne font pas le poids face à l’omniprésence des représentants des services de l’Etat tels que la DEAL, la DAF et autres ou encore face aux associations écologistes… Les deux commissions agissent sous la responsabilité du préfet.

La CDNPS est présidée par Régine Pam, l’actuelle secrétaire générale de la préfecture. Quand la CDPNAF donne son feu vert à un projet, la CDNPS y met son veto. Et vice-versa. L’un dans l’autre, le citoyen ou l’élu se retrouve dans « la colle jacques » et n’y peut strictement rien. Lorsqu’un maire décide de délivrer un permis de construire à un agriculteur parce qu’il connaît les besoins de ce dernier en étant régulièrement sur le terrain, il se retrouve au tribunal avec menace d’une grosse amende et, surtout, d’une inéligibilité. En clair, pour avoir contourné les décisions pas toujours cohérentes de la CDPNAF ou de la CDNPS, il peut très bien courir le risque de perdre le mandat que lui a confié la population. Ce n’est pas celui ou celle qui a été élu (e) par le suffrage universel qui a la main sur l’aménagement du territoire mais bien des fonctionnaires dont la plupart sont de passage sur l’île. D’où le souhait de nombreux élus locaux et des citoyens de « libérer la terre réunionnaise » pour un développement plus cohérent des terres agricoles ou des terres en friches.

Un élu de l’Est me racontait tout récemment que la CDNPS a retoqué plusieurs projets structurants, hôteliers notamment, dans cette région de l’île considérée pourtant comme « le parent pauvre » de la Réunion. Une région qui a besoin de se développer afin de créer de l’activité. Sauf que, au nom de la protection des terres agricoles et de l’authenticité réunionnaise, il ne faut surtout pas, à en croire l’administration, « dénaturer » cette micro-région. Il a même été dit en pleine réunion de la CDNPS que « si ces projets avaient été présentés pour la région Ouest, il n’y aurait eu aucun problème ». Autrement dit, pas d’autorisation pour un hôtel à Takamaka, pour un hôtel à Sainte-Rose et pour plein d’autres projets structurants dans les communes de l’Est.

En revanche, les mêmes représentants de l’administration qui, au sein de ces deux commissions, refusent ces projets au nom de la protection des terres agricoles et de l’authenticité des paysages naturels de l’Est, accordent leur autorisation pour la réalisation d’une carrière sur 23 hectares de très bonnes terres agricoles au lieu-dit Patelin à Saint-André. Idem pour l’implantation des grandes surfaces alimentaires au milieu des champs de cannes. Nombreux sont les citoyens (poussés en misouk par des élus) qui envisagent de monter prochainement des collectifs afin de dénoncer cet « accaparement » de la terre réunionnaise par l’administration, mais également pour que les députés demandent à ce que l’avis de la CDPNAF ou de la CDNPS ne soit plus conforme mais consultatif, comme c’est le cas en métropole. Là encore, comme pour la régionalisation des emplois, il y une prise de conscience qui commence à naître. A suivre !

Le footballeur Guillaume Hoarau recruté pour 1900 € mensuels à l’Etang-Salé

Je ne vais pas être plus long aujourd’hui. Nous sommes le 11 novembre, fête de l’Armistice. C’est jour férié. Je garderai mes informations, politiques notamment, pour des articles à venir. Juste le temps de vous dire, comme je vous l’avais annoncé, il y a déjà quelques semaines, que Guillaume Hoarau, l’ex professionnel de foot, sera bel et bien recruté par la mairie de l’Etang-Salé.

De gauche à droite : Mathieu Hoarau, maire de l’Etang-Salé depuis février dernier et Guillaume Hoarau, l’ex footballeur professionnel.

Contrairement au bruit qui court dans la commune, ce ne sera pas pour un salaire mensuel de 5 300 euros mais pour 1 900€ nets. Son contrat devra être signé incessamment sous peu. Le joueur de la JS Saint-Pierroise sera recruté comme chargé de mission au service des sports de l’Etang-Salé ; Sa mission durera une année pour un projet « multi sports », selon le maire Mathieu Hoarau. Guillaume Hoarau, le footballeur, a par ailleurs signé au club de basket de l’Etang-Salé. Pour revenir au foot, un partenariat serait en cours avec le PSG pour les jeunes. Partenariat qui devrait se concrétiser d’ici au premier trimestre 2023. Le maire y croise les doigts. Il ne devrait pas tarder à signer le contrat de recrutement de Guillaume Hoarau.

On reste dans une petite commune limitrophe et dans le domaine du sport, pour vous parler des Avirons où le maire Eric Ferrère a organisé, lundi dernier, en fin d’après-midi, une « cérémonie de réception » (c’est écrit comme ça sur le Facebook de la ville) pour « les valeureux raideurs des différentes courses du Grand Raid 2022 ». Parmi les invités, on retrouvait également des sportifs avironnais qui avaient arpenté durant 17 jours les sentiers menant au camp de base de l’Everest à 5 364 mètres d’altitude. Jusqu’ici, rien à dire. Et c’est tout à la gloire du maire-écrivain de célébrer les sportifs de sa commune. Sauf que les autres raideurs non licenciés qui n’ont pas été conviés à la fête l’ont un peu mal pris. Raison pour laquelle, la municipalité a décidé d’organiser également « une cérémonie de réception » pour ces derniers. Je vous laisse découvrir le carton d’invitation qui a été publié sur la page Facebook de la ville des Avirons précisant que « la Ville souhaite aussi féliciter… ».

J’aime bien le « aussi ». J’aime bien également le « …sera organisé prochainement ». Du genre, il restait quelques samoussas de la « cérémonie de réception » du lundi 7 novembre organisée pour les licenciés, que le maire a mis de côté (au congélateur sans doute) et qu’il les ressortira « prochainement » pour les sportifs non licenciés. Pour les moins « valeureux » ? Bonjour l’ambiance sportive !

Un pétage de plombs pour finir. Cela s’est passé hier, jeudi 10 novembre, en pleine séance de travail à la Chambre de commerce et d’industrie de la Réunion (CCIR). Le président Pierrick Robert avait convié les élus, chefs d’entreprises, à un temps d’échange avec Jawad Ashraf, ambassadeur de l’Inde en France, actuellement de passage dans notre île. L’occasion de parler développement des échanges entre la Réunion et la 5ème puissance économique mondiale (Rien que ça !). Une belle réunion, très constructive et enrichissante à plus d’un titre, jusqu’au moment où un élu de la CCIR (Laurent S., de la liste de David Cohen) décide de monter au créneau et de casser l’ambiance par une intervention pour le moins inhabituelle en pareille circonstance, un peu comme s’il se trouvait entre potes dans un bistrot.

L’ambassadeur a quelque peu été surpris et le président Pierrick Robert, très gêné par cette intrusion malsaine, ne savait plus s’il fallait rentrer sous la table ou dégager l’intrus, visiblement mal poli. Ce dernier était sorti fumer une cigarette (ou autre) avant d’intervenir de la sorte, jetant ainsi la honte sur la chambre consulaire. De l’avis de nombreux témoins, l’élu en question n’était visiblement pas dans un état « normal » ; Il aurait manifestement un peu trop forcé sur le jus de raisin fermenté et sur du « tabac péi bio». La présidence de la CCIR ne tolère pas ce genre de comportement et le fera savoir prochainement à l’élu lorsque celui reposera les pieds sur terre et cessera de « planer ».

En parlant de la CCIR, je profite de l’occasion pour vous annoncer que le président Robert a un peu remanié l’organigramme de la Chambre, de son cabinet plus précisément, avec l’arrivée de son nouveau directeur de cabinet, en la personne de Bernard Alphonsine qui, auparavant, bossait dans la comptabilité. Un homme de confiance que le président connaît bien et qui a fait campagne à ses côtés. A noter également l’arrivée, toujours au sein du cabinet de la CCIR, de Christian Malda, en tant que collaborateur ; Un nom qui vous parle sans doute puisque ce retraité de la CGSS a été l’homme de confiance de Thierry Robert (frère de Pierrick et ancien député-maire de Saint-Leu) ; Christian Malda a été également le bras droit de Bruno Domen lorsque ce dernier a remplacé Thierry Robert à la mairie de Saint-Leu. Il intègre à présent le cabinet de Pierrick Robert. Salim Mottara, ancien dir-cab d’Ibrahim Patel, reste à la direction du service Communication. Quid d’Ibrahim Patel que certains annonçaient pourtant au cabinet du nouveau président ? « L’ancien et l’actuel président entretiennent des relations toujours très amicales, très cordiales, mais la Chambre a besoin de tourner la page », fait-on savoir du côté de la rue de Paris.

Y.M.

([email protected])

 

Yves Mont-Rouge

[email protected]
Téléphone : 0692 85 39 64

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