Néo-enseignants affectés en métropole : « non à l’intolérable, Monsieur le Ministre ! »

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C’est une tribune de Reynolds Michel, ancien curé. Elle est relative à un sujet d’actualité concernant l’affectation des néo-enseignants en métropole.

« J’ai lu avec émotion, voire avec une certaine révolte, dans Le Quotidien du mercredi 3 août, la page consacrée aux enseignants affectés en Métropole, intitulée « Une maltraitance institutionnelle », expression utilisée par la présidente de Région, Mme Huguette Bello, pour condamner ce système d’affectation des enseignants néo-titulaires en Métropole et reprise par le Quotidien dans la page qu’il consacre à ce sujet.

Comment ne pas être en effet bouleversé par les témoignages de ces jeunes enseignant-e-s obligé-e-s de quitter leur île pour leur première affectation, tout en se trouvant dans l’obligation, dans la quasi-totalité des cas, de se séparer de leur époux (« mon mari est enseignant, il ne peut pas me suivre »), de leurs enfants et de leur « centre des intérêts matériels et moraux » (Rapport Lebreton, 2013) pour une région qu’ils/elles ne connaissent pas et, de surcroît, à la recherche d’un logement pas facile à trouver en quelques semaines.

Des témoignages où affleurent, incompréhension, désarroi, anxiété, souffrance et, parfois, choix cornélien entre vie de famille ou carrière, alors que dans le même temps existent dans leur académie des postes vacants occupés par des enseignants contractuels, venant souvent de l’Hexagone. Et qui plus est, certains de ces enseignants disent ne trouver aucune écoute bienveillante de la part de leurs interlocuteurs à la Direction générale des ressources humaines, au point de dire avec dépit que « L’Education nationale manque d’éducation » (Le Quotidien, 03/08/2022).

Comment en effet commencer ou continuer l’exercice de son métier d’enseignant – un métier qui suppose enthousiasme, confiance en soi, sérénité et bienveillance –, dans de telles conditions d’inquiétude et d’angoisse et si loin des siens ? Comment une institution qui s’enracine dans l’humanisme, qui place l’humain au cœur de son système et de son action, peut, au nom des principes abstraits : ̋répartir les enseignants équitablement sur le territoire national˝ (Pape Ndiaye) et appliquer des conditions d’un concours national…, générer dans sa pratique institutionnelle de telles souffrances, de telles maltraitances ?

Et cela dure depuis des années avec à chaque fois la même réponse du ministre ou de la ministre de l’Éducation Nationale aux questions des députés d’Outre-mer : « toutes les situations individuelles liées à des questions de familles seront étudiées avec soin », ne cesse-t-on de répéter à l’envi. Bref, la gestion au cas par cas comme la seule et unique solution. En clair, c’est le refus d’une remise à plat d’un système qui génère chaque année de nombreux problèmes humains allant de la rupture familiale à la démission d’un métier qu’on aime, après la joie de la réussite à un concours. Et ce, dans un contexte de crise de recrutement des enseignants et crise du métier des enseignants[1]. C’est inacceptable ! C’est intolérable !

De plus, c’est une politique qui va à l’encontre des principes de mobilité durable. Mieux organiser et réduire les déplacements liés aux activités professionnelles relèvent, nous semble-t-il, des politiques publiques à tous les niveaux de la société ? Pour favoriser le développement durable et la transition écologique, la politique des mobilités par le biais, entre autres, du rapprochement des lieux de travail et de résidence des actifs ou de “leur centre des intérêts matériels et moraux”, doit être, selon un avis du CESE, l’affaire de tous et de toutes, donc des administrations publiques, collectivités territoriales, entreprises et autres acteurs (CESE,23 octobre 2019). La lutte contre le changement climatique, particulièrement dans le contexte actuel, n’exige-t-elle pas d’actionner tous les leviers possibles pour agir de manière volontaire en vue d’atteindre l’objectif d’un réchauffement climatique limité, conformément aux recommandations du GIEG ? N’est-il pas temps, monsieur le Ministre, de trouver un système d’affectation des enseignants néo-titulaires…qui respecte, à la fois, l’esprit de l’humanisme laïc et républicain, le « centre des intérêts matériels et moraux » des personnes et les principes de la mobilité durable ? »

Reynolds MICHEL

 

 

 

 

 

 

[1] « Les enseignants disent apprécier leur métier, en énumèrent les intérêts (transmission de savoirs, relations avec les élèves, autonomie, créativité, temps disponible, etc.), tout en affirmant que sa pratique devient de plus en plus difficile, voire impossible, et qu’ils se sentent en défaut », Françoise LANTHEAUME, chercheure, Université Lumière Lyon II, 2011.

Yves Mont-Rouge

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3 Commentaires

  1. En passant ce concours, les lauréats savaient pertinemment que c’était un concours national, et non d’une collectivité territoriale. Je ne vois donc aucun problème à aller exercer ailleurs et dans le même temps s’ouvrir aux autres (la France en possèdent énormément). Aussi, je pense que d’autres enseignants originaires de l’île, qui exerce dans l’hexagone attendent impatiemment leur tour, se faire brûler la priorité par des néo enseignants peureux, refusant de quitter « leur » île serait vraiment écœurant.

  2. il y a beaucoup de gens de l’extérieur qui arrivent en pagaille chez nous pour prendre la place des réunionnais, normal qu’on oblige les nouveaux profs de partir , on les font dégager pour l’arrivée des nouveaux chez nous , en plus ils arrivent ici et ne veulent plus repartir, donc plus de place pour les créoles, on devrait tenir compte de la situation de chacun , mais il y a tellement de magouille et arrangement entre camarade , mais si on connaît personne on reste à terre et on va déprimé en France dans le froid .le retour sur l’île n’y comptez plus .

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