Régionales 2021 : victoire de l’abstention au 1er tour, et duel droite-gauche Didier Robert/Huguette Bello au second tour… comme en 2015

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On vous l’a dit, le vrai sondage sera celui qui sortira des urnes au soir du 20 juin. Les électrices et électeurs se sont prononcés. A vrai dire, ils ne sont pas foulés au portillon des bureaux de vote car les grands vainqueurs de ce premier tour du scrutin restent, une fois n’est pas coutume, les abstentionnistes. Voici donc en pourcentage les résultats de ce premier round des régionales. Tout est encore possible aussi bien pour la droite que pour la gauche car il s’agira bien d’une bataille de bloc contre bloc.

Didier Robert : 31,10% des suffrages exprimés ; Huguette Bello : 20,74% ; Ericka Bareigts : 18,48% ; Vanessa Miranville : 9,91% ; Patrick Lebreton : 7,78% ; Olivier Hoarau : 4,24% ; Philippe Cadet : 2,64% ; Jean-Pierre Marchau : 2% ; Joseph Rivière : 1,74% ; Jean-Yves Payet : 1,14% et Corinne De Flore : 0,23%.

La victoire de l’abstention : 63,56%

Une tendance qui se confirme au fil des élections depuis ces dernières années. Avec une petite exception quand même pour les municipales et la présidentielle, des scrutins où l’électorat arrive encore à s’identifier à une personne. Pour les autres élections, l’érosion est incontestable. La Covid et la fête des pères n’expliquent pas tout. Les raisons de cette désaffectation doivent être plus profondes. Il existe manifestement une certaine résignation des électeurs qui ne croient plus en la politique dans le sens où plus ces derniers parlent, plus les problèmes s’amplifient (augmentation du nombre de chômeurs, manque de logement, problème de déplacement, manque de transports en commune), sans compter les promesses non tenues. Au-delà des élus, nombreux sont ceux qui ne croient plus tout simplement au système et se disent « tous les mêmes, tous ne pensent qu’à leur poche). Le taux d’abstention atteint un record à l’issue de ce premier tour des régionales de 2021 : 63,56%. Et, c’est bien connu, l’abstention profite toujours aux partis traditionnels, donc à la droite et à la gauche. Ce qui fait que les Philippe Cadet, Jean-Yves Payet et autres « petits » candidats n’arrivent pas à émerger et « calent » donc en queue du classement.

Et de trois pour Didier Robert (31,10%) et la droite ?

Il revient pourtant de loin avec sa condamnation récente par le tribunal correctionnel de Saint-Denis dans l’affaire de la SPL Réunion des Musées Régionaux. Ses adversaires, notamment Huguette Bello, Ericka Bareigts et même Olivier Hoarau n’ont pas cessé de l’attaquer à ce niveau. Mais Didier Robert a toujours répondu que « personne n’était infaillible et que n’importe qui pouvait commettre une erreur dans sa vie ». Force est de constater que ceux qui se sont déplacés jusqu’aux isoloirs ont entendu son mea culpa. Le candidat de l’union des droites et des centres est parvenu, en dépit d’une abstention record, à concrétiser dans les urnes, en s’imposant face à ses 10 concurrents unis par le slogan « TSDR » (Tout Sauf Didier Robert). Et même si tous ces soutiens de droite (les 12 maires) n’ont pas complètement mis le paquet à l’occasion de ce premier tour, on peut malgré tout dire qu’ils ont fait le job car il en allait également de leur crédibilité dans cette compétition. Dans ces douze communes-soutiens (les fameux accords du 4 mai dernier à Bras-Panon, Didier Robert est arrivé en tête. Dans certaines communes de droite, on pourrait dire « peut encore mieux faire », à l’instar de Saint-Pierre, par exemple, où les électeurs se sont un peu plus mobilisés pour les départementales (en faveur des candidats soutenus par la municipalité) que pour les régionales. Dans ces douze communes de l’île dites de droite et du centre, compte-tenu du taux d’abstention, on peut dire que le vainqueur de ce premier tour dispose encore d’un bon réservoir de voix. Tout est encore possible pour lui. Didier Robert et la droite n’ont pas encore perdu même si, sur papier, et en additionnant les voix des autres candidats (Bello, Bareigts, Lebreton, Hoarau, Marchau…), la gauche est arithmétiquement majoritaire. Mais il est bien connu que politique et arithmétique ne riment pas toujours. Il va sans dire que Didier Robert, qui brigue un troisième mandat – une première dans l’histoire des régionales s’il parvenait à se faire élire – va jouer son va-tout jusqu’à la dernière minute avant l’ouverture des bureaux de vote le 27 juin prochain. Nul doute qu’avec André Thien-Ah-Koon et Michel Fontaine, ils vont réunir très prochainement tous les autres maires de droite pour définir une stratégie de guerre. La droite sera face à son destin. Va-t-elle laisser ce mandat à la gauche ? Ou bien mettra-t-elle le paquet pour garder la main sur cette collectivité afin de bien préparer les échéances à venir, tout en ébauchant un plan pour le Département et ne pas perdre le contrôle de ladite collectivité ? Inutile de dire que Didier Robert, avec cette première place toute relative (plus de 10 points sur Bello), est plus que jamais confiant et se sent prêt à soulever les montagnes. En clair, en dépit de toutes les critiques dont il a fait l’objet ces derniers jours (y compris de la part de « son » média hyper subventionné qui a manifestement choisi la maire de Saint-Denis), Didier Robert ne s’attendait pas à « donner un lastic » à tous ses adversaires. Son bilan, bien que souvent montré du doigt par ses adversaires, a joué en sa faveur dans le sens où ces derniers ont annoncé poursuivre, en les remaniant un peu, le POP (Plan ordinateur portable), la continuité territoriale et la Nouvelle Route du Littoral (NRL). Certes, ses détracteurs ne manqueront pas de faire remarquer qu’il aura perdu une dizaine de points par rapport aux régionales de 2015 (40,36%), mais il pourra toujours invoquer un taux d’abstention beaucoup plus élevé cette fois-ci.

Huguette Bello face à son destin et à celui de la gauche

Huguette Bello

Malgré une campagne très visible et audible, notamment sur les réseaux sociaux Ericka Bareigts, la maire de Saint-Denis, n’a pas concrétisé comme elle aurait souhaité. Avec 18,48% des suffrages exprimés, elle termine non seulement derrière Huguette Bello aux régionales, mais elle finit également derrière Didier Robert dans sa propre commune (33,11% contre 33,14%). Pas grand-chose, mais quand même ! Surtout qu’elle avait été largement élue face à Didier Robert aux municipales de juin 2020…

Le message est on ne peut plus clair. Les dionysiens n’ont pas oublié la promesse faite par leur maire l’année dernière, à savoir qu’elle resterait s’occuper de sa commune, qui plus est la plus grande de l’Outre-mer, où le boulot ne manque d’ailleurs pas. Les régionales, ce sera pour une autre fois, sans doute. Même si en tant qu’ancienne ministre, elle « a le bras long » pour reprendre une expression employée durant cette campagne électorale, force est de constater que l’expérience d’Huguette Bello a eu raison de la jeunesse d’Ericka Bareigts. L’ancrage politique historique de la maire de Saint-Paul, qui a été députée durant plus de 20 ans, a été plus payant, notamment auprès des anciens militants communistes en particulier et de gauche en général, même si la maire de Saint-Denis a eu officiellement le soutien du PCR.

Ericka Bareigts

D’après ses déclarations faites hier soir sur les plateaux de télévision et même lors de ses interventions publiques, Ericka Bareigts devrait rejoindre Huguette Bello, la candidate qui a terminé en tête de ces primaires à gauche. Elles sont toutes les deux pour « le changement de président » à la Région et appellent à « la victoire des forces de progrès ». Elles savent par ailleurs que « la gauche locale se trouve à un tournant de son destin politique » et dispose d’une occasion de ravir cette collectivité à la droite.

Patrick Lebreton

Les messages lancés également par Patrick Lebreton et Olivier Hoarau en faveur d’un rassemblement des forces progressistes ont été également on ne peut plus clair. Patrick Lebreton aura la possibilité de fusionner sa liste. L’addition des voix de gauche (Bello, Bareigts, Lebreton), sans compter Olivier Hoarau, Jean-Pierre Marchau est supérieur à 50%. Sur papier.

Vanessa Miranville se prépare pour les régionales de 2028

Vanessa Miranville

Elle ne fusionnera pas avec les partis classiques parce qu’elle veut marquer sa différence et cultiver sa propre identité politique citoyenne. C’est ce qu’a déclaré avec force de conviction, hier soir, la maire de la Possession, responsable de CREA. Elle ne fusionnera pas. Et même si elle avait obtenu plus de 10% des suffrages, elle se serait maintenue. Elle ne devrait donc pas donner de consigne de vote en faveur de tel ou tel candidat. Pas publiquement, du moins ! En tant qu’élue de l’Ouest, siégeant au sein du TCO présidé par Emmanuel Séraphin, la maire de la Possession a des contacts sans doute plus privilégiés avec des élus de sa micro-région et, plus particulièrement, des élus de gauche. Restera-t-elle jusqu’à la fin figée sur sa position de neutralité politique ? Ce qui est sûr, c’est que la présidente de CREA prépare déjà le coup d’après : les régionales de 2028. En effet, ce mandat durera exceptionnellement 7 ans pour pas qu’il y ait de télescopage avec les prochaines présidentielles et législatives de 2027.

Les négociations ont démarré depuis cette nuit

Les candidats encore dans la course tant aux régionales qu’aux départementales ont commencé les négociations. Les états-majors ont réparti les tâches. Chaque colistier influent sait ce qu’il a à faire. Les téléphones ont dû beaucoup sonné et les heures. Les discussions ont démarré. Si la gauche veut s’unir, il lui faudra se mettre d’accord sur la fusion des listes avant ce mardi 18 heures. Les candidates (et candidats) concernés vont discuter projet mais surtout de places. Ericka Bareigts l’a clairement dit hier soir qu’elle va défendre le positionnement des représentants de la société civile sur la liste d’union de la gauche. Cette fusion ne se fera évidemment pas sans quelques sacrifices. Des deux côtés, certains des colistiers vont devoir laisser leur place. Ce sera le prix à payer pour une éventuelle victoire.

Aussi bien à droite qu’à gauche, cette journée de lundi et celle de demain vont paraître très longues et elles ne seront pas de tout repos pour Didier Robert et les soutiens potentiels, ainsi que pour Huguette Bello, Ericka Bareigts, Patrick Lebreton et les autres candidats.

Y.M.

([email protected])

Yves Mont-Rouge

[email protected]
Téléphone : 0692 85 39 64

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