Ste-Suzanne : « ma maison est inondée mais l’expert judiciaire, qui coûte très cher, ne veut rien voir »

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C’est l’histoire vraie d’une famille qui, en 2020, achète une maison dans le secteur de Deux-Rives à Sainte-Suzanne. Le couple de fonctionnaires (un Réunionnais et une métropolitaine) vient d’obtenir sa mutation à la Réunion. Il décide de s’installer avec ses deux enfants à Sainte-Suzanne. Il achète la maison construite sur un terrain de 400 m2 à un peu plus de 200 000 €. Le couple emménage en décembre 2020. Jusque là tout va bien. Jusqu’en avril 2021, en fait. Jusqu’aux premières pluies. Désagréable surprise pour cette petite famille. La maison est inondée.

L’eau arrive de partout et même du sous sol, elle traverse le carrelage. Le couple est désemparé. Il avise le vendeur (l’ancien propriétaire de la maison) par Messenger. « Je n’ai pas ses coordonnées. Il m’a promis de passer aussitôt, mais nous n’avons reçu aucune visite », explique le père de famille (qui souhaite garder l’anonymat car la procédure judiciaire est toujours en cours concernant cette affaire).

Les mois passent. Nous sommes en 2022. Deuxième inondation et même spectacle de désolation. « De nouveau, nous essayons d’entrer en contact avec l’ancien propriétaire, qui ne répond pas. Nous appelons les gendarmes, qui nous expliquent que cela n’est pas de leur ressort. Nous parvenons à joindre les services municipaux qui envoient sur place l’employé d’astreinte. Lequel constate les dégâts causés par les eaux », précise le père de famille. Qui ajoute : « J’ai dû casser mon mur ; Nous avons également acheté un Kärcher pour nettoyer. Nous avons envoyé, via Messenger, des photos et des vidéos de notre maison complètement inondée, à l’ancien propriétaire. Rien à faire ! ».

La galère ne fait que commencer pour le couple. « J’ai tenté de me rapprocher d’une Maison de Justice. L’employé de celle de Sainte-Suzanne était malade et absent. Il n’y en a pas à Sainte-Marie ; Celle de Saint-Denis est déjà bookée. Je me suis tourné vers celle de Saint-André où le conciliateur m’a expliqué gentiment que Sainte-Suzanne ne relevait pas de sa juridiction. Mais à force d’insistance et face à mon désarroi, ce dernier a bien voulu m’aider… Dans le même temps, j’avais fait venir pas moins de trois entrepreneurs qui m’ont conseillé de faire des drainages. J’ai fait appel à mon assurance… ».

Pour autant, le problème n’a pas été réglé car il s’agit manifestement «d’un vice caché ». Raison pour laquelle, le couple décide de faire appel à la justice, en passant par un cabinet d’avocats sudiste spécialisés dans ce domaine.

Peu de temps après, le juge du Tribunal de Saint-Denis va désigner un expert judiciaire. Lequel se rend chez nous à Deux-Rives en novembre 2022. « Dans son pré-rapport, l’expert qui était resté sur place en tout et pour tout trois heures de temps, estime, uniquement à vue d’œil, qu’il n’y a aucun désordre apparent. En clair, il explique qu’il n’y a aucun problème. Or, avant lui, j’avais fait venir un expert, puis un huissier qui ont bien conclu à un vice caché. J’ai aussi les attestations des voisins qui ont vu l’eau dans ma maison durant les pluies. Sans compter le témoignage d’une amie qui se trouvait en vacances à la maison lors de ces épisodes pluvieux. L’expert judiciaire ne veut rien entendre. Il ira jusqu’à nous dire que le premier expert auquel on avait fait appel était un pseudo-expert et que l’huissier était orienté », souligne le père de famille, qui ne sait plus quoi faire.

Plus de 3000 € pour l’expert judiciaire désigné par le juge

L’expert judiciaire désigné par le juge du Tribunal de Saint-Denis (Chambre des Référés)  lui présente la facture : plus de 3000 €. Et en cas d’une deuxième expertise avec la venue d’un sapiteur (spécialiste du bâtiment qui accompagnerait l’expert), la note pourrait monter jusqu’à 9000 €. Rien que ça ! Le père de famille se dit dépité : « il ne me reste plus que mes yeux pour pleurer. J’achète une maison que je paye sans négocier aucun euro. Et je me retrouve dans une telle situation avec une justice qui m’impose un expert judiciaire qui, lui, ne veut rien voir du tout et qui, en plus, coûte très cher… Mon avocat me dit qu’il va falloir aller au fond. Mais je sais ce qui risque de se passer. Le juge qui m’a imposé cet expert judiciaire ne pourra juger que sur la base du rapport pondu par ce même expert judiciaire, qui m’a déjà taxé plus de 3000 €. Autant dire que les carottes sont cuites pour nous… » désespère le père de famille qui s’interroge aujourd’hui : « pourquoi le juge ne nous a-t-il pas proposé une liste d’experts judiciaires ? Pourquoi nous a-t-il imposé cet expert judiciaire ? Qui contrôle les tarifs qu’appliquent les experts judiciaires à la Réunion ? Existe-t-il une grille tarifaire concernant ce genre de prestations pratiquées dans l’île ? ». Le couple a déjà sollicité tous les services pour obtenir une réponse concernant notamment la grille tarifaire. Zéro réponse jusqu’à présent.

Le couple s’est également renseigné. La maison a été construite sur une ancienne zone inconstructible qui a été ensuite déclassée. Pour quelles raisons ? « Aucune infrastructure de VRD n’a été faite. Nous avons également pris tous les relevés pluviométriques depuis 2011 auprès de Météo France. Nous avons évidemment payé pour cela. Rien n’est gratuit. Il se trouve qu’avant 2021, la première inondation, les pluies étaient encore plus violentes d’après les relevés de Météo France. Or, les vendeurs m’ont laissé entendre qu’il n’y a jamais eu d’inondation dans cette maison… C’est pas ce que soutiennent les voisins».

Même si la procédure judiciaire est toujours en cours, le père de famille va faire appel au Défenseur des Droits de l’Homme. « Mais tout relève du parcours de combattant ici. Nous avons vécu plus de 20 ans en métropole, jamais nous n’avons été confrontés à une telle lenteur au niveau des services publics. Il faut patienter parfois durant deux heures au téléphone pour avoir un interlocuteur au bout du fil. Nous allons saisir le législateur concernant la grille tarifaire des experts judiciaires. Nous ne pensions pas que la justice, qui est un service public, pouvait coûter aussi cher à la Réunion. Nous sommes deux fonctionnaires, en nous serrant la ceinture, nous pouvons payer, en sacrifiant d’autres dépenses qui auraient profiter à nos enfants. Mais mettez-vous un instant à la place du citoyen avec des revenus plus modestes et qui se retrouve dans la même situation ! Nous comprenons la colère des gens lorsqu’ils appellent Radio Free Dom pour se plaindre du service public dans cette île. C’est révoltant ! Nous sommes en train d’user notre santé, nos nerfs ; Notre famille est impactée. Nous ne demandons qu’une chose : que justice soit faite. Nous n’avons pas inventé ces inondations». Affaire à suivre !

Y.M.

 

 

Yves Mont-Rouge

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5 Commentaires

  1. Quand vous avez acheté Monsieur, il devait être écrit quelque part que le bien se situait sur une zone inondable, si c’est le cas vous aurez du mal à obtenir réparation et une longue procédure vous attend, Bon courage à vous.

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