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Vous avez dit « emplois pistonnés » ?

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Il n’y a pas que les politiques qui « pistonnent ». Certes, il y a évidemment les politiques, mais pas que… Nombreux sont des hauts cadres venus de « l’autre côté la mer », qui « pistonnent » épouse et/ou amis (es), connaissances, souvent dans les boutiques où ils officient. Des « emplois pistonnés » ou des « emplois de copinage ». Au SDIS, par exemple, ou dans d’autres administrations. Et pourtant, des secrétaires de direction ou attachées de communication, il en existe aussi de disponibles sur le marché local ! Ces haut-cadres font également régulièrement appel à leurs connaissances de l’hexagone lorsqu’il faut réaliser des études sur tel ou tel sujet, relevant la plupart du temps d’ailleurs de la grosse « branlette intellectuelle ». Des études grassement payées avec l’argent des contribuables locaux. Mais j’y reviendrai dans un instant sur les « emplois pistonnés ». J’en ai un qui n’est pas mal du tout, vous verrez.

230 000 m2 de terres agricoles sacrifiées pour la réalisation d’une carrière

Je souhaitais commencer par un autre sujet, tout aussi préoccupant, celui des terres agricoles, de la terre réunionnaise dont les propriétaires, ou même les élus, les maires n’ont aucunement la maîtrise puisque c’est l’Etat avec ses fonctionnaires qui gèrent. Les fonctionnaires qui gèrent les terres que nos ancêtres se sont battus, parfois même en versant un peu de leur sang, en plus de leur sueur, pour les acquérir. Je voudrais revenir sur cette histoire que je vous ai relatée, lundi dernier 31 octobre, dans le cadre d’un article qui a été relayé par la suite par d’autres médias. Et c’est tant mieux !

C’est l’histoire vraie de ce couple, parent de 4 enfants, qui n’a qu’un souhait : sortir du RSA afin de se lancer dans la vie professionnelle en profitant notamment d’un héritage, à savoir un terrain agricole de 5 500 mètres carrés que Larissa Robert (épouse Paris) a hérité de son père. Le couple a préparé son projet : réalisation d’une table d’hôte afin de valoriser le terrain, tout en se servant par la suite des produits issus de l’exploitation de leurs terres pour les servir aux clients.

La municipalité de St-André a dit « banco » à ce projet agro-touristique. Il en manque dans la commune et dans la région Est. Pour pouvoir le concrétiser, le couple demande de déclasser une centaine de mètres carrés afin de construire un bâti. La mairie n’y voit pas d’inconvénient. Sauf qu’elle n’a pas du tout la main en la matière. Et c’est valable pour toutes les communes à la Réunion et en Outre-mer où l’avis de DAF (Direction de l’Agriculture et de la Forêt) via la CDPNAF fait loi car il s’agit d’un avis conforme et non consultatif contrairement en métropole.

23 hectares de terres agricoles… devraient laisser place à une carrière.

En clair, les maires de l’hexagone n’en ont que faire de l’avis de la CDPNAF s’ils veulent encourager la concrétisation des projets portés par leurs administrés. Ici, ou de façon plus général dans les anciennes colonies, nos élus sont toujours au garde à vous devant les fonctionnaires de l’Etat. Autrement dit, pendant les campagnes électorales, ils disent aux citoyens : « votez pour moi, je vais faire ceci, je vais faire cela… ». Au final, ils ne peuvent pas faire grand-chose car, à bien y regarder, ce n’est pas l’élu qui commande, c’est le préfet, le représentant de l’Etat.

Une fois élu, le maire, le président du Département, de la Région doit, concernant l’aménagement du territoire réunionnais, demander l’autorisation aux fonctionnaires de l’Etat. L’article que j’ai publié lundi dernier à propos du projet de ce couple a fait beaucoup réagir. Parmi les commentaires, j’en ai relevé un qui dit ceci  : « le projet des époux Paris apparaît juste et nécessaire et  la CDPNAF ne fait qu’appliquer la réglementation juste et nécessaire. Les élus rencontrés par ce couple auraient dû les informer des complications juridiques et administratives de leur projet. C’est d’ailleurs la première précaution à respecter pour tout projet d’entreprise. Il est toujours  facile aux élus de faire des promesses illégales et  irréalisables pour ensuite rejeter la responsabilité d’un refus d’autorisation sur des administrations respectueuses de la loi. Les  élus et les agents administratifs des collectivités locales doivent se montrer plus responsables pour apporter le meilleur conseil aux administrés. En l’occurrence, pour le projet des époux Paris, et si leur parcelle est réellement classée en Zone Agricole, il est possible d’y organiser un projet d’agriculture, mais pas de construction pour une table d’hôte. La loi permet ainsi de préserver les terrains agricoles ».

Un commentaire manifestement bien éclairé voire très naïf. Bien sûr, on ne peut qu’être d’accord. Il faut comme le dit cet internaute « protéger les terres agricoles » et « les élus tout comme les administratifs des collectivités locales doivent se montrer plus raisonnables pour apporter le meilleur conseil aux administrés… ».

En suivant ce raisonnement, j’ai donc compris qu’il ne fallait pas toucher à 100 mètres carrés de terrain parce que l’Etat doit absolument « protéger les terres agricoles ». Mais comment expliquer alors que, dans le même temps, la CDPNAF (composée en majorité des représentants de l’Etat, DAF, DEAL, ONF…) ainsi que la préfecture (courrier signé par la secrétaire générale Régine Pam) qui ont émis un avis défavorable au « petit » projet des époux Paris, aient pu, valider le projet de carrière au lieu-dit Patelin à Saint-André ? Dans ce cas précis, la préfecture donne l’autorisation d’exploiter (de sacrifier) 23 hectares (230 000 mètres carrés) de terres situées en zone agricole pour la réalisation d’une carrière. Où est donc passée cette grande volonté publique de protéger les terres agricoles ?

A moins d’être vraiment très bête, il y a quelque chose qui m’échappe là. D’un côté, la CDPNAF refuse l’autorisation à un couple de réaliser son projet de création d’une table d’hôte d’à peine 100 m2 sur ses terre et, de l’autre côté, les mêmes services de l’Etat, la préfecture en l’occurrence, donne son feu vert à la société Préfabloc Agrégats à exploiter 23 hectares de terrains agricoles à des fins de carrière. 230 000 mètres carrés de terres qui plus est situés à même pas deux kilomètres des 5 500 m2 de terrains des époux Paris, de pauvres gens qui ne veulent plus survivre du RSA et qui souhaitent se lancer dans une vraie activité professionnelle afin de donner l’exemple à leurs enfants. Allez comprendre la cohérence d’une telle décision. Dans le cas des époux Paris, la CDPNAF et la préfecture ont fait savoir qu’il fallait « être agriculteurs » pour exploiter un terrain agricole et ouvrir une table d’hôte. En suivant cette logique, il faudrait donc en déduire que les responsables de Préfabloc Agrégats seraient agriculteurs puisqu’ils ont obtenu l’autorisation de construire un concassage et d’exploiter durant 25 années une carrière sur 230 000 mètres carrés de terres agricoles.

« Emplois pistonnés » : faites ce que j’écris, pas ce que je fais

J’en arrive maintenant aux « emplois pistonnés ». Je vous le disais, il n’y a pas que les politiques qui « pistonnent » leurs militants. Le « pistonnage » est malheureusement monnaie courante à tous les niveaux. Je connais le patron d’un journal local, si prompt à s’acharner médiatiquement sur tel ou tel élu et à régler ses comptes personnels en jetant en pâture telle ou telle personne dans son édito qui, dans ce domaine du « pistonnage », n’est pas non plus blanc comme neige … loin s’en faut ! Lui, qui aime se faire passer pour le « père la morale » et grand dénonciateur des magouilles devant l’Eternel, qui lave plus blanc que blanc en fustigeant régulièrement les recrutements politiques pistonnés et en brocardant allègrement les emplois présumés fictifs des collectivités publiques, se livre (auss)i à de curieux arrangements, voire à d’odieux chantages, pour protéger les emplois de complaisance de ses copains.

Ainsi, en décembre 2021, à la veille de l’annulation par le Conseil d’Etat des élections municipales à l’Etang-Salé, il passe un étrange pacte avec l’ancien maire qui était pourtant un de ses bons «clients» du samedi (au point que ce dernier avait dû porter plainte pour diffamation par l’entremise de son avocat Morel) : l’ancien édile ne sera plus critiqué dans l’édito, et même mieux l’éditorialiste fera activement campagne pour lui dans le cadre des municipales partielles de février 2022.

En contrepartie, l’ancien maire embauche avec un gros salaire un « frère » de l’éditorialiste, Dominique M., connu pour quelques frasques bancaires, et accessoirement ancien directeur de cabinet de St-Louis version «Maire Bis» de 2014 à 2020 … Ce « frère » avait en effet « décroché » le concours d’attaché territorial à … Mayotte (la même filière que le Saint-Louisien et ex-président du Centre de Gestion Leonus T. ?) mais il peinait, en revanche, à se faire nommer dans une collectivité de notre île. La suite, on la connaît : articles très élogieux pour l’ancien maire Jean-Claude Lacouture, campagne puante de dénigrements acharnés à l’encontre de Mathieu Hoarau, son jeune challenger et de ses colistiers (n’est-ce pas Isaline Tronc ?) leur imputant des manœuvres électorales graves et allant même jusqu’à empiéter sur la vie privée de Mathieu Hoarau en inventant des violences conjugales. Malgré tout ça, la population a tranché en élisant un jeune maire, allant ainsi à l’encontre de toute la violente campagne de dénigrement contre le jeune candidat .

L’histoire aurait pu s’arrêter là, sauf que le « frère » Dominique – qui, dit-on, « travaille doucement le matin et pas trop vite l’après-midi », est constamment en arrêt maladie, à tel point que son supérieur hiérarchique – un fonctionnaire d’Etat, plus précisément un inspecteur des impôts détaché sur le poste de directeur financier – ne l’a quasiment jamais vu … Problème : dans la fonction publique territoriale, le lauréat d’un concours est nommé stagiaire pour une durée d’une année au terme de laquelle il est soit titularisé s’il donne satisfaction, soit viré en cas d’insuffisance professionnelle. Éventuellement le stage peut être prolongé de 6 mois par exemple lorsque l’agent a été absent pour raisons de santé … Mais l’éditorialiste « intouchable » est de nouveau intervenu, cette fois auprès du jeune maire nouvellement élu, en lui mettant, comme il sait si bien le faire, une bonne pression du genre : « si tu touches à mon copain, je te démonte ! » Le deal imposé au nouveau jeune maire est le suivant : je te laisse tranquille mais tu titularises mon « frère » Dominique M. au bout d’un an (donc décembre 2022), et il sera ensuite recruté par mutation à la commune de l’Entre-Deux par le maire En Marche dans le cadre d’un autre deal … Elle est pas belle la vie ! Faites ce que j’écris, mais pas ce que je fais !

Mais que fait le Parquet face à ces chantages mafieux émanant d’un patron d’une presse locale, face à ces pactes de corruption imposés à des édiles locaux, et du recel dont bénéficie fraternellement mais indûment un futur fonctionnaire territorial sur son emploi de complaisance ? A suivre !

J’aurai dû commencer là, par la fête de la lumière, le Dipavali qui a été inaugurée, hier jeudi, à Saint-André en présence d’une kyrielle d’élus et d’élues en sari. Une fête quelque peu gâchée par une polémique politique (ou politicienne ?). Jean-Marie Virapoullé, vice-président du conseil département (et également chef de file de l’opposition municipale de Saint-André) accuse Joé Bédier, le maire, d’avoir exclu de la fête de la lumière le Département en n’acceptant pas la présence de la conseillère départementale Viviane Payet Ben-Hamida (également élue de l’opposition municipale) pour représenter le président Cyrille Melchior, actuellement en vacances. Du côté de la municipalité, et c’est d’ailleurs écrit noir sur blanc dans le déroulé, on précise que l’invitation a été adressée au président du Département Cyrille Melchior. Idem pour la Région où c’est la présidente Huguette Bello qui y a été conviée. Huguette Bello a fait le déplacement dans son beau sari vert et a servi un long et vibrant discours au public présent. Cyrille Melchior, absent du Département, n’a pu honorer de sa présence cette inauguration. Jeannick Atchapa, également vice-président du Département, était présent. Tout comme la conseillère départementale Julie Aroubani, non invitée, mais venue accompagner son camarade député Frédéric Maillot.

Maurice et Nadine Gironcel

Tout comme Nadine Gironcel a accompagné son papa Maurice, président de la Cinor… Autrement dit, selon la mairie de Saint-André, il n’y a pas lieu d’en faire tout un fromage. Ou un bonbon piment ? Et moi j’ajouterai, arrête batay marmailles, soyez des êtres éclairés aux ampoules LED ou à la lampe à huile, qu’importe, mais apprenez à illuminer votre esprit de bonté, de tolérance, de sagesse, de paix… « Lève la tête, sort’ dan ‘ fénoir » ! Sur ce, je vous souhaite un bon Dipavali !

Y.M.

([email protected])

 

 

 

 

 

Yves Mont-Rouge

[email protected]
Téléphone : 0692 85 39 64

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