Tout avait pourtant si bien commencé. Tout en douceur, avec une belle mélodie créole d’Ousanousava  « Oté grand-mère » si joliment interprété par Ophélie Mauve, avec sa guitare. Une belle prestation donc de la finaliste du concours de karaoké qui a fait de la chanson sa passion mais qui, dans la vie, va faire des études de médecine.

Applaudissements bien mérités dans la salle pour la jeune femme à la voix suave. Puis, c’est la benjamine du conseil municipal de Saint-Benoit, Angélique Pedre qui, à la demande du maire Patrice Selly, a procédé à l’appel. Quelques absents dont Ridwane Issa, le 1er adjoint, actuellement en mission professionnelle hors du département. Des absents aussi sur les bancs de l’opposition. Patrick Dalleau a donné procuration à sa collègue Valérie Dijoux. Sabrina Ramin n’a pas donné signe de vie. Idem pour les autres. Aux côtés de Valérie Dijoux, sont présents les deux conseillers municipaux de gauche version Bello/Ratenon, à savoir Philippe Le Constant et Jean-Luc Julie qui, le matin même (mercredi 27 septembre) au cours d’une conférence de presse, avaient taillé un costume au maire et président de la Cirest, Patrice Selly. Ce qui fait que ce dernier est arrivé au conseil municipal, souriant certes, mais un peu sur le qui-vive quand même. D’où les piques (foutan en créole) de temps à autres lâchées en direction de l’opposition, toujours avec le sourire.

La séance a débuté en musique, dans le calme. Le maire a présenté la nouvelle directrice générale adjointe (DGA) Mélissa Alamoutou, assise juste à côté de Béryl Sadoune, la DGS qui, elle, va quitter la mairie de Saint-Benoit dès ce vendredi pour regagner sans doute son poste d’origine à la mairie de Saint-Denis. Mais avant de partir, le conseil municipal a  adopté une protection fonctionnelle en sa faveur, afin de payer ses frais de justice dans le cadre d’une procédure qu’elle a engagée suite à une agression verbale dont elle a été l’objet à la mairie de Saint-Benoit. Le conseil en a fait de même pour un agent communal, un certain A.G (pas plus de précision dans le rapport présenté en séance).

Toujours dans le calme, plusieurs dossiers ont été adoptés à l’unanimité. Patrice Selly s’est vu contraint de retirer la délibération votée lors de la séance du 4 juillet dernier relatif à la mise en place d’un déontologue pour les élus. Le déontologue n’étant autre qu’un élu municipal de Saint-Benoit, à savoir Patrice Ellama. Le conseiller de l’opposition Philippe Le Constant avait tiré la sonnette d’alarme le 4 juillet dernier mais Patrice Selly avait malgré tout fait adopter ce rapport. Sa décision a été retoquée par le contrôle de légalité de la préfecture. Raison pour laquelle, il a retiré ladite délibération.

Philippe Le Constant a profité de l’examen de ce rapport pour interpeller le maire qui est aussi président de la Cirest. « Est-ce qu’il y a un déontologue à la Cirest ? ». Réponse du maire : « vous n’êtes pas conseiller communautaire et nous ne sommes pas à la Cirest. Venez assister au prochain conseil de la Cirest le 17 octobre, c’est public, et vous poserez la question ». Et vlan, dans les dents ! Philippe Le Constant a bien encaissé le coup.

Jusqu’ici, hormis un peu de mauvaise foi de chaque côté, le conseil se poursuivait dans une ambiance relativement sereine. Jusqu’à l’examen du projet NPNRU relatif notamment à la construction de l’école les Girofles en 2025, gros projet de réaménagement de ce quartier, à l’instar du programme de rénovation urbaine (Labourdonnais et autres quartiers) engagé par la nouvelle municipalité.

C’est donc sur l’école des Girofles que les échanges ont été « épicés » entre le maire et les deux élus de l’opposition, Le Constant et Julie. Patrice Selly demandait au conseil d’approuver le dossier technique détaillé de ce projet. Sauf, comme l’a fait remarquer, Philippe Le Constant, « on n’a pas reçu le dossier technique détaillé pour lequel vous nous demandez de voter ! ».

« Le programme technique détaillé est à la Cirest »

Réponse de Patrice Selly : « le programme technique détaillé est à votre disposition dans les services ». Jean-Luc Julie intervient : « je suis allé dans vos services, il n’y est pas ». Le maire donne la parole à son directeur des services techniques qui précise : « ce n’était pas le bon service ». Philippe Le Constant reprend le micro : « Monsieur le maire, je vous le dis sans aucune polémique, vous ne pouvez pas nous demander de nous prononcer sur un dossier qui n’est pas dans le document que vous nous présentez au conseil municipal. On ne peut pas voter uniquement sur des mots. Nous voulons des écrits car les paroles s’envolent, les écrits restent. Aussi, je vous demande de retirer ce rapport à l’ordre du jour et de nous le présenter au prochain conseil avec, cette fois, le dossier technique détaillé ».

Réponse un tantinet agacé du maire : « nous n’allons pas retirer ce rapport. Le dossier est à la Cirest ». Réplique de Le Constant : « vous venez de nous dire, sur la question du déontologue, qu’on était pas à la Cirest ici, et là, quand vous arrange, vous nous renvoyez à la Cirest où on ne siège pas, comme vous l’avez dit vous mêmes à l’instant ! ».

Sur le coup, Patrice Selly a un peu perdu pied. Monique Tacoun-Marimoutou, une élue de la majorité a tenté de voler à son secours en saluant « l’ambition de l’équipe majoritaire, la ténacité et le courage politique » du maire, mais elle a, au cours de son intervention, interpellé Jean-Luc Julie, qui n’a pas du tout apprécié. Au moment où ce dernier a souhaité répondre, une autre élue de la majorité, Christelle Hoareau, a tenté elle aussi de placer deux mots. Réaction instantanée de Jean-Luc Julie : « ferme ! ».

Certains auraient entendu « ferme à ou », d’autres « ferme » tout court. Allez savoir. Le maire a saisi la balle au bond en disant qu’il n’acceptait pas « les insultes envers les élus » etc… Le rapport concernant des Girofles a été soumis au vote. Adopté à la majorité. Le Constant et Julie n’ont pas participé au vote.

Un brin taquin, Patrice Selly a précisé devant la caméra du live Facebook, « la population verra que vous êtes contre la construction d’une école ». Puis, il a suspendu la séance, le temps pour l’assemblée de retrouver un peu de sérénité. Et pour les élus, y compris le maire, d’aller griller quelques « blondes » à l’extérieur de la salle de l’Echange de la médiathèque.