Volcan, agriculture, violences urbaines, drogue, Mahé de Labourdonnais… le préfet s’exprime sans langue de bois !

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Jérôme Filippini est préfet de la Réunion, en fonction depuis août 2022. Au-delà des prises de parole officielles lors des conférences de presse, des visites de terrain ou des manifestations diverses, il aime bien échanger avec la presse dans un cadre plus convivial. Il a, depuis son arrivée dans l’île, instauré un nouveau format : les petits déjeuners avec les représentants locale. Le deuxième, depuis sa prise de poste, s’est déroulé ce mardi 11 juillet. L’occasion d’échanger sur tous les sujets. Jérôme Filippini n’est pas du genre à avoir sa langue dans sa poche. Il est direct, franc, communicatif, ouvert et très accessible.

Jérôme Filippini, préfet de la Réunion en fonction depuis août 2022 et sa directrice de cabinet Parvine Lacombe.

Au cours de cette rencontre autour d’un café, plusieurs sujets libres ont été abordés tels que le volcan, le Trestar Star, l’agriculture, les récentes violences urbaines, le terrorisme, le trafic de drogue, les élus locaux à l’Elysée, le déplacement de la statue Mahé de Labourdonnais, l’errance animale… Yves Mont-Rouge était présent à ce petit déjeuner. Voici son résumé d’un peu plus d’1 heure et 30 minutes de discussions à bâtons rompus avec le représentant de l’Etat à la Réunion.

Volcan : « responsabilisation collective » et « drones parlants »

Le Piton de la Fournaise est entrée en éruption le 2 juillet dernier. La préfecture a sorti un arrêté interdisant l’accès à l’enclos. Mais pour autant, le préfet ne souhaite pas confisquer le volcan comme il a en été le cas par le passé. Raison pour laquelle, il en appelle à « la responsabilisation collective » ainsi qu’à « la plus grande prudence » car « le risque zéro n’existe pas ». Si le préfet dit comprendre l’engouement du public pour le volcan, il tient à rappeler que « c’est extrêmement dangereux », si l’on s’approche un peu trop près des coulées. D’où la présence des forces de l’ordre sur site pour rappeler au respect de l’arrêté préfectoral.

Le préfet a rappelé également que c’est la première fois que les alertes ont été adressées via les téléphones portables. C’est un système d’alarme qui avait été testé lors d’un exercice à la SRPP au Port, puis durant les cyclones. « Il s’agit d’un instrument de sécurité qu’on utilise pour des risques majeurs ». La directrice de cabinet du préfet, Parvine Lacombe, présente au petit-déjeuner, a précisé que des « tests avec des drones parlants au dessus du volcan ont été réalisés ce week-end. Le but étant d’informer en direct les visiteurs, leur faire comprendre que le danger peut être imminent et qu’il leur faut rebrousser chemin s’ils se trouvent dans les sentiers aux alentours de l’éruption. Le préfet promet avec tous les acteurs concernés « une grande réflexion en 2023 » à propos du volcan.

Tresta Star échoué à St-Philippe : création «d’une zone à éviter » en mer pour les bateaux

Echoué depuis 17 mois environ sur la côte Sud-Est de la Réunion à Saint-Philippe, à hauteur du vieux port du Tremblet, l’épave du Trestar Star, ce pétrolier-souteur mauricien, n’a toujours pas été enlevée. Nombreux sont les visiteurs qui se rendent sur le lieu pour voir le bateau en prenant des risques. « C’est glissant, la carlingue bouge d’elle même… On n’a absolument pas la capacité d’empêcher l’accès. Mais on communique régulièrement sur le risque majeur. L’épave est très abîmée. Il y a eu des rapports d’expertise. Ça partira avec le temps… Ce bateau n’était pas fait pour affronter une mer pareille », a souligné le préfet. En rappelant que « l’assureur devra payer des compensations au Parc national et à la ville de Saint-Philippe. Des compensations environnementales, sans doute des centaines de milliers d’euros ».

Par ailleurs, eu égard au trafic important de bateaux au large de la Réunion – près de 11 000 navires par an – les autorités françaises planchent sur la possibilité de création d’une zone à éviter. « C’est ce qu’on a proposé aux autorités mauriciennes. Il s’agit, comme son nom l’indique, d’une zone que les bateaux devraient éviter sauf cas d’urgence. A ce stade, Maurice n’est pas favorable. La France va déposer un dossier auprès de l’ONU qui a le pouvoir de décision dans ce domaine. Ça prend du temps. Aujourd’hui, d’après nos informations, beaucoup de bateaux passent près des côtes, qui sont à risques, pour capter la 5 G (internet) ».

Fruits et légumes : « les discussions ne sont pas terminées »

Ces derniers ne sont pas du tout contents car lors de sa venue dans notre île en mai dernier, la Première ministre Elisabeth Borne leur avait promis une enveloppe financière de l’ordre de 3 millions d’euros pour venir en aide à ces deux filières agricoles. Or, ils n’en ont eu que 150 000 €. Interrogé, le représentant de l’Etat a souhaité tempérer en expliquant que « C’est le début. Les discussions ne sont pas finies sur le POSEI 2024. Pour l’instant, il est vrai que les résultats ne sont pas là, que les producteurs sont partis d’une réunion assez contrariés, il y a quelques jours, mais la promesse devrait être tenue », a rassuré le préfet Jérôme Filipini.

Violences urbaines : « nous devons faire preuve de vigilance »

« Vigilance », c’est le maître-mot après les violences urbaines qui ont eu lieu il y a quelques jours dans l’hexagone et à la Réunion. « Il n’y a évidemment rien de comparable entre ce qui s’est passé en métropole et ici, mais au Port, ça a été extrêmement violent ; Des cocktails Molotov ont été lancés contres les policiers. Certains ont fait usage de mortiers d’artifice. Raison pour laquelle, suite au décret pris par la Première ministre jusqu’au 15 juillet inclus concernant la vente d’artifices, le préfet de la Réunion a pris un arrêté en rajoutant les fusées de détresse ainsi que le carburant dans des bidons et les armes à feu. A la Réunion, il y a eu près de 300 poubelles incendiées et on déplore des dégradations sur une trentaine de voitures. Le préfet tient à saluer le travail des forces de l’ordre mais aussi celui des associations de quartiers, des médiateurs et des parents dont certains, suite aux émeutes, avaient été invités à venir récupérer leurs enfants au commissariat Malartic à Saint-Denis

Terrorisme : « Le risque zéro n’existe pas »

Interrogé à ce sujet, le représentant de l’Etat a expliqué que « le risque zéro n’existe pas. Les gens peuvent se radicaliser très rapidement sur internet. Il peut y avoir des loups solitaires. Nous faisons de la veille et du suivi. Il n’y a pas de crainte à court terme, je l’espère. Mais nous devons rester vigilant car il peut y avoir des fous partout… »

Trafic de drogue : « le zamal est une drogue dure »

Interrogé sur l’ampleur du trafic de drogues dures dans notre département, le préfet a répondu que « 35% des Réunionnais consomment habituellement du zamal. Le trafic commence par la consommation de drogue. Le cannabis, c’est très grave car le zamal est une drogue dure. Il y en a qui finissent à l’hôpital psychiatrique. Les services de l’Etat mènent des opérations de contrôle, de saisies aussi. Je pense aux Douanes, à la police, à la gendarmerie…La Réunion exporte du zamal vers Maurice. Un gros travail est fait à ce niveau par les forces de l’ordre et le parquet. Je veux parler des saisies à l’aéroport, à la Poste, au Port de la Pointe-des-Galets ». Le préfet annonce « un scanner des containers » en 2024, capable par exemple de détecter un sac posé au milieu de meubles dans un container…Nous faisons de la prévention sur les drogues, sur l’alcool et ses ravages ».

Statue Mahé de Labourdonnais : « c’est un déplacement et non un déboulonnage »

« Déplacer une statue n’est pas du tout interdit », a précisé Jérôme Filippini qui s’appuie sur le Ministère de la Culture qui avait été consulté dans le cadre de ce dossier. « S’il avait été question de déboulonnage, c’est de casser la statue, je n’aurai pas mis ma main dans cette affaire. Dans le cas présent, il s’agit d’un déplacement et d’une ré-installation de la statue dans un site magnifique, qui a du sens, un site qui va permettre de re-contextualiser l’histoire ». Ne souhaitant pas rentrer dans les querelles politiciennes ou autres bataille d’historiens, le préfet a cité une phrase de Camus, qui est en quelque sorte son mantra : « nous étouffons parmi les gens qui pensent avoir absolument raison ». Lui a choisi « un chemin intelligent pour permettre de réaménager ce square. Je n’ai pas d’état d’âme à l’avoir fait », a-t-il insisté.

Joé Bédier à l’Elysée : « d’autres élus ont été également invités »

Nous vous annoncions ce matin l’invitation faite par Emmanuel et Brigitte Macron à Joé Bédier, maire de Saint-André, pour assister aux festivités du 14 juillet.

« D’autres élus locaux ont également été invités à ces festivités où, cette année, l’Inde sera mise à l’honneur. Le Premier ministre indien y sera présent. La Réunion compte une grande communauté indienne. On a fait passer le message à Paris. Saint-André est aussi la plus grande ville de France ayant la plus grande communauté indienne… »

A quand la fin de la NRL ?

« Il y a eu un comité de pilotage avec la Région il y a quelques semaines. La fin du chantier est prévue pour 2028. C’est ce qu’a annoncé la Région. C’est un chantier complexe au niveau juridique. Il y a eu des contentieux passés. Le contentieux sur la carrière de Bois-Blanc, c’est fini. L’Etat s’est désisté de son appel. La Région aussi. L’Etat et la Région travaillent en étroite collaboration sur cette route ».

Errance animale : 8 000 à 10 000 euthanasies par an à la Réunion

Dans le cadre du Plan de lutte renforcée contre l’errance animale, le préfet a missionné le sous-préfet de Saint-Pierre qui avait réuni récemment tous les maires de l’île. L’Etat soutient l’action des communes qui ont compétence dans ce domaine au niveau des actions de capture pour lesquelles l’Etat a engagé 4 M€ au cours de ces dernières année. L’errance animale fait par ailleurs beaucoup de mal aux élevages. Il faut savoir que 8000 à 10 000 euthanasies sont réalisées par an ».

Les dossiers de la rentrée

« Il sera beaucoup question d’agriculture, de la transformation agricole, avec la crise avicole, la canne (1,350 tonnes), les fruits et légumes, la préservation des terres agricoles, la CDPNAF (je défends l’avis conforme). Il sera question également de l’écologie, du tourisme, du traitement des déchets, ménagers et des déchets dangereux, de la vie chère également… »

 

Yves Mont-Rouge

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Téléphone : 0692 85 39 64

8 Commentaires

  1. De la haine, kkk ? moi, qui suis pour jeter à la mer cette statue, je n’éprouve aucune haine envers qui ce soit. Même pas pour vous, le nostalgique des temps des colonies. J’espère que vous allez honorer ce grand personnage qui vous manque tant chaque année. Dites-nous : vous allez opter pour sa date de naissance ? de sa mort ? de son déplacement ? En tout cas, je paierais pour voir cela.

  2. Ah, kkk ! voilà un bon client pour vous ; kabot kaf, dont les écrits et l’âme sont remplis tellement de haine qu’il va, inéluctablement, s’étouffer avec, l’un de ces jours. Amener le à la commémoration avec vous, il vous sera très…servile.

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